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Les officiers firent donc les routes à pied pendant toute la durée de la colonne. Le général était porté dans un hamac, mais il marchait le plus souvent comme tout le monde. On traversait très souvent des rivières ou des marais avec de l'eau, parfois, jusqu'aux épaules.

Enfin nous quittâmes Dogba, toujours sur des jonques, mais cette fois sans être remorqués. Des nègres servaient de machine à vapeur et poussaient les jonques avec de longues perches en accompagnant chaque poussée d'un cri. Plusieurs fois il nous arriva de rester en panne, faute d'eau. Il fallait alors descendre et pousser les jonques à bras ; c'est ainsi que nous parvînmes à Agony où le colonel Dumas avait établi le camp.

La colonne était composée de quatre groupes. Je n'ai jamais su où se trouvait le premier. Le deuxième, dont je faisais partie, après avoir franchi le Zou, devait se diriger sur Paouignan, capitale des Dassas. Le troisième devait aller s'établir sur le Zou à Allahé, et le quatrième en avant d'Abomey. Tandis que deux compagnies devaient se rendre à Toune sur le haut Mauno pour former un croissant au centre duquel se trouvait Atchéribé, le général se porta à Oumbégamé dans la direction du camp de Behanzin ; il y arriva le 7 novembre 1893, mais le trouva évacué.

Behanzin semblait vouloir gagner le pays des Dassas par Savalou. Les débris de son armée l'abandonnaient. Ses ministres les plus dévoués, tels que Ymavo et Yemové, ainsi qu'un grand nombre de princes de sa famille, étaient venus se rendre à la merci du général. Son artillerie, composée de trois canons Krupp et d'une mitrailleuse de provenance française, tombait entre nos mains. On organisa une colonne volante afin de serrer Behanzin de près et de s'attacher à ses pas. Mais il se dérobait avec une très grande habileté. On savait que les Dassas lui refusaient l'hospitalité. Ce fut alors, de notre part, une véritable chasse à l'homme