Page:Leo - Un mariage scandaleux.djvu/507

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sera pas pris la main dans le sac ; mais qu’alors, si ça vous arrive, quand ça ne serait que pour une épingle, c’est fini. Apparemment qu’ils ne sont honnêtes que des yeux et des oreilles dans ce monde-là. Donc, M. Gavel, voyant comme les choses allaient pour lui à Poitiers, a demandé son changement, et on les a envoyés à Rennes. C’est loin, mais pourtant le journal y va, de sorte qu’on y savait déjà toute l’histoire, et qu’ils ont trouvé les portes fermées là comme à Poitiers. Faut croire qu’enragé de ça, M. Gavel s’est imaginé d’aller en Amérique, pensant qu’on ne l’y connaîtrait pas.

— Allez ! allez ! s’écria la Lurette, on est ben trompé dans ce monde ! Un homme si riche ! Aurait-on dit ça le jour de sa noce, quand il était si brave et qu’il donnait des poignées d’argent !…

— Oh ! reprit Gène en haussant les épaules, vous êtes comme ça, vous autres, un homme riche, il vous semble que ça ne peut pas manquer d’être un honnête homme.

— Sans doute, répliqua une autre. Et pourquoi ne le serait-il pas, ayant tout ce qu’il lui faut ?

— Il doit y avoir du linge de sec à présent, dit en se levant la Françoise. Je vais aider Lucie à le plier.

— Lucie est à la maison, répondit Gène, mais si vous voulez, mère Françoise, vous pourriez en l’attendant trier le sec sur les buissons.

Mme Michel craint le soleil ! observa une des laveuses, après le départ de la Françoise. Elle se souvient toujours d’avoir été demoiselle.

— Et quand elle s’en souviendrait, répliqua Gène aigrement, ça ferait-il tort à quelqu’un ? Faudra-t-il point que, pour ressembler à tout le monde, elle devienne jalouse et bavarde, comme on en voit tant ?

— Je ne dis pas ça, répondit la laveuse intimidée, mais je dis qu’elle n’est pas une vraie paysanne, quoi !