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Un cyprès et un rosier blanc ont grandi sur la tombe de Clarisse dans le cimetière.

La maison de la mère Françoise s’est enrichie de beaux espaliers et de rosiers en fleurs, greffés sur tige. La mère Françoise en ce moment, un enfant dans ses bras, descend le sentier qui conduit à la prée, du côté de la fontaine.

L’enfant a des yeux noirs et des cheveux blond de lin. Sa figure douce, intelligente et fine rappelle une figure de notre connaissance. Il joue indiscrètement avec le bonnet de sa grand’mère, qui s’écrie plusieurs fois d’un ton sévère : Lucien ! Lucien ! ce dont le petit bonhomme ne tenant compte, elle le pose enfin à terre en disant : Voyons ! c’est-il pas une honte, un grand garçon de deux ans et demi se faire porter comme ça ? Si je le dis à Micheline, elle se moquera de toi.

— Pas mignonne, Micheline, grand’mère, elle court trop vite avec son petit mali.

— Oh ! pardine, quand le Louis à la Gène est là, faut pas s’occuper d’elle. Attends seulement, loulou, que la petite Geneviève soit plus ferme sur ses jambes et elle te tiendra compagnie. Ça sera ta petite femme aussi, est-ce pas ?

— Non, dit Lucien d’un ton sérieux.

— Pourquoi ça ?

— Elle est trop petite.

La bonne femme n’admira pas dans cette réponse enfantine l’aspiration éternelle de l’humanité vers un idéal supérieur ; mais elle trouva le mot plein d’esprit, et saisissant de nouveau le petit Lucien dans ses bras, elle franchit la haie qui sépare son pré de celui des Bertin.

La prée avait rajeuni. De nombreuses rigoles, pratiquées en tous sens, charriaient d’en haut un liquide noirâtre, et déjà, malgré la chaleur, les regains étaient épais.