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rant. Ils la regardèrent avidement, comme si elle eût été l’espérance. Elle était bien pâle et toute haletante. Elle mit une poignée d’argent sur la table en disant : Je viens d’emprunter cinquante francs.

— D’emprunter ? et à qui ? s’écria M. Bertin.

— À quelqu’un d’honorable, et sans conditions, répondit-elle ; nous le rendrons plus tard. Pour l’amour de ma pauvre sœur, acceptez-le.

— Il n’est que trop impossible de le refuser, dit la mère.

M. Bertin regarda sa femme, poussa un éclat de rire nerveux, faillit briser sa chaise et bondit hors de la chambre. Il ne revint que le soir, et Mme Bertin sut qu’il avait tenté vainement toute la journée d’emprunter sur billet. Le lendemain matin, il prit sans mot dire vingt francs et partit pour Gonesse, où il acheta ce qui était nécessaire à Clarisse.

Vers la fin d’avril, la malade était à toute extrémité. Depuis un mois Mme Bertin et Lucie la veillaient alternativement toutes les nuits. On dormait à peine ; il fallait se lever dix fois. Lucie avait extrêmement maigri ; et sa pâleur était transparente comme celle d’une statue de cire. En la regardant, souvent sa mère frémissait. La pauvre femme eût voulu se dévouer seule ; à cause de son âge, elle souffrait moins de la privation de sommeil ; mais Lucie réclamait avec ardeur sa part de dévouement, et sa jeune et douce figure, ses naïves consolations faisaient, au milieu des cauchemars de la nuit, tant de bien à Clarisse, qu’elle eût, au contraire, désiré sa sœur auprès d’elle plus souvent.

Le dimanche matin 28 avril elle fut si mal, qu’on la recommanda aux prières dans l’église. L’après-midi beaucoup de personnes vinrent faire visite chez les Bertin. Mlle Boc elle-même y vint et fut bien accueillie. C’est dans