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des noces, afin de mettre le jour leurs robes de percale blanche avec des fleurs dans leurs cheveux. Gustave, qui venait d’arriver, époussetait son habit et se faisait faire un faux col par Lucie. Au milieu de cet émoi, une visite de Gène fut assez mal reçue, parce qu’on craignit qu’elle ne retardât le travail. Le petite paysanne s’en aperçut et ne resta guère ; mais avant de partir, elle dit à Lucie, tout bas :

— Les Bourdon ont bien mal fait de choisir ce mois de septembre pour leurs noces, allez, mam’zelle Lucie. Lisa vient d’accoucher d’un garçon, beau comme le jour ! Si vous saviez comme les langues s’en donnent ! On prétend qu’il ressemble à son père, et les voisines disent qu’elles veulent le porter baptiser demain pendant le mariage.

— Pauvre enfant ! murmura Lucie tout émue, qu’en fera-t-on ?

— Bien sûr, mam’zelle, ils ne le garderont point. Le Jean doit épouser la mère, à ce qu’on dit, et il ne prendra pas la charge de cet enfant, qui d’ailleurs lui ferait peine à voir.

Cela rendit Lucie encore plus triste. Elle eût voulu ne pas aller à cette fête, qui lui semblait maudite. Mais le moyen ! Elle avait trop à obtenir pour oser tout demander.

Cependant, elle ne put s’empêcher d’être satisfaite en se trouvant fort jolie dans sa belle toilette, le lendemain. Pourvu que Michel me voie ! se dit-elle. Mais elle le chercha en vain dans les rangs de la foule qui accourait les yeux béants, la figure épanouie, sur le passage du cortége. On avait beaucoup crié autrefois contre M. Gavel, à cause de Lisa, mais ce jour-là, devant les belles voitures, conduites par des cochers en gants blancs, devant la toilette idéale de la mariée, le sourire triomphant de l’époux et ses largesses, devant l’éclat des parures et le grand air