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Mme Bertin. Puisque d’ailleurs nous ne trouvons pas de journaliers pour la couper…

— Voilà une belle idée, parbleu ! s’écria le père. Après ça, que mangerons-nous ?

— Le blé ou sa valeur, n’est-ce pas la même chose ? répliqua sa femme. Nous ne mettrons pas tout l’argent. D’ailleurs, est-ce nous qui couperons le blé !

– Le fait est que tous les moissonneurs sont engagés à présent, dit-il. J’avais compté sur ce diable de Michel !

– Je ne sais pas, s’écria Mme Bertin, comment tu peux prononcer ce nom-là.

— Ma foi, je n’en sais rien non plus, si ce n’est qu’il me vient à la bouche. Après ça, peut-être bien que Lucie voudrait faire notre moisson avec lui ? Il faudra que je le fasse inviter aux noces par Mme Bourdon. Il sera superbe en garçon d’honneur, avec son habit bleu et ses souliers ferrés. Tu lui donneras le bras, n’est-ce pas, Lucie ?

— Je m’en ferais honneur, répondit-elle.

— Tais-toi ! s’écria Mme Bertin. C’est épouvantable de l’entendre parler ainsi.

— Je n’aborde jamais ce sujet la première, puisqu’il vous déplaît, reprit Lucie d’une voix ferme, quoique son visage fût couvert de rougeur. Mais, quand vous chercherez à ridiculiser celui que j’honore vous m’entendrez toujours protester.

— Il faut se dire qu’elle est folle, s’écria M. Bertin en quittant la chambre, sans quoi on la pilerait dans un mortier.

En effet, quelle étrange figure faisait le rêve de Lucie au milieu des apprêts de ces noces pompeuses, et en face des rêves bien différents de sa mère et de sa sœur !

Après quelque débat, M. Bertin finit par se mettre en quête d’un acquéreur pour la moisson mûre qui se cour-