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XVII


Huit jours s’écoulèrent, pendant lesquels Lucie eut à supporter constamment, soit les injures et les menaces de son père, soit les adjurations élégiaques de Mme Bertin, soit le mépris et la colère de sa sœur. Elle resta ferme, offrant dans sa pâleur et son silence l’image vivante de la protestation. Elle attendait. Elle savait bien que, chez son père surtout, le temps était un dissolvant infaillible. Elle devinait qu’à force de tristesse, d’amour et de souffrance, elle vaincrait la résistance de sa mère quelque jour. Clarisse était l’obstacle le plus invincible. Il n’y avait dans cette âme-là ni faiblesse insouciante ni amour indulgent. Seule en elle-même, assise à l’ombre dans la vie, elle n’avait éprouvé que le revers de tous les beaux sentiments humains, et sa force intérieure, n’ayant pu s’épancher en amour, s’était aigrie en intolérance.

Quant aux arguments de la raison, Lucie comprenait instinctivement qu’ils eussent été sans force contre le culte consacré de l’orgueil, devenu chez ses parents une seconde vie, quoique extérieure. Pourrait-elle plus tard faire valoir ces arguments avec avantage ? Quels événements, s’ajoutant aux faits habituels, pourraient la seconder ? Elle