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— Quel livre lisez-vous ? demanda Lucie.

— Le dernier que vous m’avez donné, l’Histoire des voyages.

— Où en êtes-vous ?

— Je ne sais pas, répondit-il, naïf et confus comme un écolier sincère.

— Ah ! c’est ainsi que vous lisez ! s’écria-t-elle en riant. Quel savant vous ferez un jour, Michel !

— Je ne peux plus lire, dit-il. Il n’y a pour moi sur les pages que du noir et du blanc, et, quand je veux m’y forcer, je lis les mots sans les comprendre.

— À quoi songez-vous donc ? reprit-elle en baissant les yeux.

Il ne répondit pas, et dit seulement une minute après :

— La belle rose que vous avez !

— Elle embaume ! dit-elle en respirant ; puis, par-dessus la haie, elle la lui tendit, toute chaude de son haleine. En rougissant, il la pressa sur ses lèvres, et la rendit à la jeune fille.

— Quoi ! dit-elle, plus rose que la fleur et d’une voix entrecoupée, vous ne la gardez pas ? En même temps, la refusant du geste, elle étendait la main…

Cette main disparut sous d’ardents baisers. Leur premier mot sans doute allait être un aveu, quand la porte du jardin s’ouvrit.

— Lucie ! appelait M. Bertin.

Elle tressaillit et s’élança vivement dans l’allée.

— Me voici ! dit-elle.

— Ah ! tu causais avec Michel, dit son père. Viens, j’ai à te parler. Il lui prit le bras, et, l’emmenant à quelques pas :

— Voyons ! demanda-t-il en regardant Lucie dans les yeux, veux-tu te marier ?

Elle rougit beaucoup.