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Ne rougis pas pour cela, mon brave. Il me semble que je connais ta figure ; comment t’appelles-tu ?

— C’est Pierre Michel, monsieur, le fils de la mère Françoise, dit Mourillon. Je l’ai engagé pour les semailles du printemps, parce qu’à nous trois, Cadet, Jean et moi, qui pourtant ne chômons point, nous avions encore trop d’ouvrage.

— Ah ! je le reconnais fort bien à présent, reprit M. Bourdon. Mais tu as quitté le pays quelque temps, Michel, si je ne me trompe ?

— Oui, monsieur, j’ai resté près de trois ans en place à Château-Bernier.

— Chez le sorcier, dit Voison en riant.

— Tu en es donc sorti avant la Saint-Jean, demanda M. Bourdon.

— Je m’ennuyais du pays, répondit Michel d’un ton bref.

— C’est pas pour ça, reprit encore Voison, et tout le monde se mit à rire ; c’est parce que la fille au sorcier…

— Dites donc, père Voison, interrompit Michel d’une voix calme quoique haute — mais on voyait son front rougir de colère — m’est avis que vous causez trop et que vous allez encore donner c’te peine à M. Bourdon de vous remontrer que vous dites des bêtises.

— Eh bien ! eh bien ! de quoi s’agit-il ? demanda M. Bourdon.

— Faut pas l’asticoter, voyez-vous, messieurs, dit Mourillon, il prend tout d’ suite la mouche. Mais tout d’ même, quoique vif, c’est un bon gars, not’ maît. Voyons, Michel, un peu de patience.

— Voici deux heures et demie, vous plaît-il que nous allions examiner le tracé ? dit en se levant l’ingénieur, peu curieux des secrets de Michel, et qui depuis le commencement du dîner restait silencieux et indifférent,