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porte à deux battants, faite pour l’entrée des charrettes, et dans laquelle une porte plus petite se trouvait pratiquée pour l’usage ordinaire. En ouvrant, Lucie crut apercevoir une lueur chez les Touron. Peut-être est-il déjà quatre heures du matin, pensa-t-elle. Qu’est devenu le pauvre Cadet ?

Elle fit quelques pas dans la grange à moitié vide, puis, à demi-voix, elle appela : Michel !

On ne répondit pas. S’approchant tout près du tas de foin, elle répéta encore : Michel !

Cette fois, un froissement prolongé se fit entendre, et presque aussitôt au-dessus de la meule parut la tête ébouriffée de Michel. Il regardait comme un homme qui s’éveille, mais quand, à la lueur de la lanterne, il eut reconnu Lucie :

— Ah ! dit-il, je croyais rêver votre voix, mais c’est bien vous. Et qu’y a-t-il, bon Dieu ! mam’zelle Lucie ?

— Rien de fâcheux, répondit-elle en montrant le pain ; seulement j’avais oublié de vous donner ceci.

— Comment ! ça ? dit Michel en riant.

— Oh ! ce n’est pas pour vous, mais pour Cadet. Il n’est pas venu ? Quelle heure est-il ?

— Je vas voir un peu, dit Michel.

Et il alla sur la meule jusqu’à la grande fenêtre carrée de la grange où il contempla le ciel.

— Ma foi ! je ne sais pas trop, reprit-il en se laissant glisser à terre, près de Lucie. Pourtant je ne crois pas qu’il soit bien tard. Après ça, mam’zelle Lucie, je me connais mieux au soleil qu’aux étoiles. Ah ! qu’il fait beau ce soir ! ajouta-t-il en la regardant avec ivresse.

— Ici ? dit-elle en souriant, vous avez un triste logis.

— Ah ! j’y suis trop heureux, répondit-il.

— Écoutez ! dit Lucie à voix basse. J’entends rouler une pierre dans le chemin, et quelque chose comme le