partialité. Mourillon a surpris ensemble M. Gavel et sa fille ; mais il avoue lui-même que Lisa avait une bourse dans la main. Ce n’était donc pas un rendez-vous d’amour, mais un acte de justice et de compassion à l’égard de cette fille.
— N’essaie pas de le justifier ! s’écria M. Bourdon. Un homme assez dépourvu de moralité pour séduire une servante de seize ans dans la maison de sa fiancée, ne sera jamais qu’un débauché sans frein. Je sauve ma fille en rompant ce mariage.
— Hélas ! reprit Mme Bourdon, ne saurait-elle être sauvée qu’au prix de son bonheur ?
— Tu crois que ce sera pour Aurélie un coup très-sensible ?
— Comment n’en serait-il pas ainsi ? Aurélie conforme, il est vrai, ses sentiments à ses devoirs, mais le sentiment uni au devoir n’en a chez elle que plus de force. Or, depuis deux mois, d’après tes ordres mêmes, elle considère M. Gavel comme son mari.
— Et depuis deux mois il la trompe d’une manière indigne !
— Qu’en savons-nous ? Selon toute apparence, puisque la grossesse de cette misérable fille est déjà connue, l’époque de ces relations coupables serait antérieure à l’engagement de M. Gavel vis-à-vis d’Aurélie.
— Faible atténuation de sa faute, répliqua M. Bourdon, car s’il n’a pas respecté ma maison et la présence d’Aurélie, c’est qu’il ne respecterait pas sa propre maison, une fois marié ; c’est qu’il n’aimait pas Aurélie, c’est qu’il ne l’épouse que par convenance.
— L’amour est-il une condition nécessaire du mariage ? demanda-t-elle d’une voix stridente et sèche.
— Pourquoi pas ? répondit M. Bourdon avec un peu d’hésitation. Ma fille est jeune, belle, pure, aimante.