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dant plusieurs jours ? C’est impossible, Michel ! Vous devriez comprendre que la prison n’a rien de honteux quand on en sort innocent.

— Pour que la première canaille venue, un jour, vienne me reprocher ça, et m’appeler gibier de gendarme ? Non, non, mam’zelle Lucie, jamais ! jamais !

— Eh bien ! dit-elle avec résolution, je vous cacherai, moi. Venez à la nuit dans notre jardin, et attendez-moi dans le bosquet.

Il s’écria tout saisi de joie : — Est-ce possible ! ça ne pourrait-il pas vous causer quelque ennui ?

Mais elle répondit en souriant :

— Vous me croyez donc une égoïste ? Ne faut-il pas prendre un peu de peine pour ses amis ?

Et comme la reconnaissance de Michel éclatait en vives paroles, elle se hâta de lui imposer silence du geste. Car à l’extrémité du grand clos, elle apercevait la petite Francille, venant du côté de la ferme des Èves, où peut-être la curiosité de sa maîtresse l’avait envoyée, sous quelque prétexte, récolter des renseignements. Craignant que cette enfant vagabonde et rusée n’arrivât jusqu’à eux, elle engagea Michel à se cacher dans un fouillis de plantes sauvages, ronces et clématites, qui remplissaient l’espace entre la charmille et le mur. Un chèvre feuille enlacé autour d’un tronc se renversait dans l’intervalle étroit, et le comblait par en haut d’une verdure épaisse. Michel disparut sous cet abri. Mais la petite fille avançait toujours biaisant, furetant, rongeant on ne sait quoi, cherchant de la gomme aux cerisiers, et jetant autour d’elle des regards de chat sauvage. Dans le chemin, en même temps, se fit entendre le pas d’un cheval. Craintive, songeant que sa présence en ce lieu, où Michel travaillait tout à l’heure, pourrait amener la découverte de son ami, ou tout au moins faire soupçonner l’asile qu’elle venait