— Comment, Suzon, tu ne sais pas où est Michel ? où est Cadet ? où est Jean ?
— Michel, répondit la petite, est tout contre le jardin du logis, à tailler la charmille. Cadet et Jean sont à faire des rigoles au pré des Arliantains.
— Bien, Suzon. Maintenant, quand les gendarmes viendront, tu ne diras pas cela.
— Non ! mam’zelle Lucie, répondit la petite, effrayée, qui regarda tout autour d’elle, comme cherchant un asile où se cacher.
— S’ils te tourmentent bien fort, tu leur diras que Jean, Michel et Cadet sont au champ des Èbles, et tu leur montreras le chemin.
— Oui, mam’zelle Gène.
— Il vaut mieux, dit Mlle Bertin, qu’elles aillent trouver Marie. Tu lui répéteras, Suzon, tout ce que nous t’avons dit.
— Oui, mam’zelle.
— À présent, Gène, il faut nous séparer. Où est le pré des Arliantains ?
— J’irai, moi qui le connais, répondit Gène. Courez aux charmilles, mam’zelle Lucie.
Tandis que Gène descendait la colline, Lucie remonta du côté de Chavagny.
Prenant au plus court, elle franchissait comme un oiseau les fossés et les haies, déchirant quelquefois ses mains ou sa robe ; mais ne s’arrêtant point. Elle approchait du clos des Charmilles quand elle aperçut les gendarmes remontant la colline du côté de l’est, et se dirigeant cette fois au trot de leurs chevaux sur la ferme des Èves. La jeune fille précipita sa course, le cœur rempli de crainte. Si Michel était revenu à la ferme par le chemin !
Derrière le jardin du logis, tout entouré de murailles,