— Pardieu, si ! il y aura quelque chose à faire ! s’écria Michel, dont la figure s’enflamma. Écoute, Cadet, et toi aussi, Jean : mettons-nous tous les trois, mes gars, et partout où le Gavel aille, allons-y aussi pour crier à tout le monde : Celui-là, c’est un débaucheur de filles et un abandonneur d’enfants ! Et pas plus tard que dimanche, au sortir de l’église, sur la place de Chavagny ; et encore à Poitiers, puis plus loin, partout où il ira. Vois-tu pas que le monde le prendront en horreur, et qu’il sera forcé de se cacher sous terre ? Comme ça, on se passera des juges, et il sera puni rien qu’avec son indignité.
— C’est dit ! s’écria Cadet, transporté, en secouant vigoureusement la main de Michel. Oui ! oui ! nous ferons ça, et nous commencerons dès dimanche, quand les messieurs Bourdon sortiront de l’église. On verra après si le brigand trouve une femme qui veuille de lui !
— Alors, c’est nous qui irons devant le juge, dit Jean d’une voix brève.
— Bah ! pourquoi donc ?
— Parce que ça n’est pas permis de dire la vérité. Le tuilier de la Grand’-Chaume a-t-il pas été condamné en justice, le mois passé, pour avoir appelé voleuse la Cornulière ? Tout le monde pourtant savent qu’il a dit vrai.
— Qu’on nous actionne ! répondit Michel, ça n’en sera pas moins dit ; nous aviserons à nous y bien prendre et à faire grande besogne en peu de temps.
Mais comme il achève ces mots, Jean, poussant un cri sourd, se lève le bras étendu vers un objet qu’il montre à ses compagnons. Cadet voit aussi et devient tout pâle.
— Ah ! s’écrie-t-il, c’est le diable qui nous envoie ce damné-là pour nous pousser à mal.
À trois cents pas environ, dans la direction de Chavagny, la voiture de M. Gavel glissait lentement au-dessus de la lande, comme une apparition fantastique. Le cheval,