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— Parbleu ! à Poitiers on vous balayerait ça par un escadron de cavalerie. Je vous le dis, c’est votre devoir !

— Mais j’ai pas de scadron, moi, monsieur Berthoud.

— Votre écharpe suffira.

— Allons ! fit Perronneau en soupirant, faut donc que j’aille…

Il se dirigeait vers son domicile, suivi de l’agent-voyer, quand de bruyantes acclamations retentirent.

— Entendez-vous ? s’écria Berthoud.

Le maire tourna la tête, et la parole expira sur ses lèvres béantes, car il vit son épouse qui, tenant d’une main son tablier rempli, de l’autre déposait des œufs dans la besace de l’âne.

— Vive la mairesse ! criaient les acteurs de la comédie.

— Vive la mairesse ! braillaient les gamins.

Il n’y eut pas jusqu’à l’âne qui, électrisé par ces cris, ne fît entendre des applaudissements formidables.

La Perronnelle, charmée, revint en se rengorgeant vers son mari ; mais, au milieu de son triomphe, elle fut accueillie par ces mots :

— S…… femelle ! tu me mets dans de beaux draps ! Tu me compromets au vis-à-vis du gouvernement. V’là M. Berthoud qui me disait que je dois prendre mon écharpe, et dissiper ce troupement de la part du roi.

— M. Berthoud ne sait ce qu’il dit, répliqua sans façon la mairesse. Il ferait beau voir que le roi voulût empêcher la coutume. Si tu veux recevoir un fier charivari, tu n’as qu’à essayer ça.

— Au fait ! dit le maire en s’apaisant, c’est-il pas jour de fête ? Un jour de fête, faut que le peuple s’amuse, monsieur Berthoud.

En conséquence de cette parole magnanime, les rênes de l’autorité flottèrent à Chavagny le reste de la soirée.

Le peuple n’abusa pas, car avant dix heures, malgré