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qui arrivait ; aussi je ne te commande point, je te prie de laisser M. Gorin.

— De tout mon cœur, m’sieur Bourdon, car en vot’présence il n’osera pas, je crois, recommencer.

Il lâcha donc Gorin, qui se releva écumant de rage et souillé de poussière.

— Voyons, voyons, reprit M. Bourdon, il faut faire la paix. Je sais que M. Gorin a eu les premiers torts ; il sera assez galant homme pour le reconnaître ; quant à toi, Michel, tes vengeances sont trop rudes…

— La paix ! hurla Gorin en montrant le poing à son ennemi, jamais ! jamais !

M. Bourdon alors, l’emmenant à l’écart, se mit à lui parler avec cette éloquence habile et insinuante qu’il possédait.

La foule s’étant dispersée, Michel s’approcha de Gène et de sa compagne :

— Bonjour, Gène ; bonjour, Martine. Je m’attendais guère de vous voir ici. Je suis fâché que vous m’ayez trouvé en dispute, mais ça n’était pas ma faute.

La Martine était devenue toute rouge. C’était une fille à tournure lente et gauche, dont le visage plat, large et inintelligent était couvert de taches de rousseur. Ses yeux petits et sans vivacité prirent cependant une expression tendre et touchante en s’attachant sur Michel. D’un ton très-doux, presque plaintif, elle répondit :

— Y avait si longtemps qu’on ne vous avait vu !

Michel était un peu embarrassé vis-à-vis d’elle, et aussi parce que tout le monde les regardait. Pourtant, comme c’était son devoir de faire politesse à la Martine, il l’invita à danser. On se poussait pour les voir.

— A-t-elle une belle chaîne d’or ! disait-on.

— Les dentelles de sa coiffe ont coûté des mille et des cents.