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— Mon témoignage en est une, dit Lucie indignée en se levant.

— Sans doute, sans doute ; il y a aussi la parole de M. Michel.

Mais, continua-t-elle d’un ton pénétré, en changeant subitement de physionomie, quand il s’agit de l’homme qu’Aurélie aime et qu’elle a choisi, qui d’ailleurs passe partout pour un galant homme, il est impossible de le condamner sans un examen approfondi. Quand tu seras mariée, ma fille, tu sauras que les hommes peuvent avoir à se reprocher beaucoup de fautes, sans être pour cela méprisables, ni même de mauvais maris. M. Gavel a connu cette petite avant de s’engager à Aurélie ; nous l’avons eue cet hiver à notre service ; elle faisait sa chambre, et je me rappelle qu’on la voyait partout derrière lui. Ces filles sont d’une effronterie !… Un jeune homme est facilement entraîné… ses sens peuvent le trahir ; et, s’il est vrai… il doit être bien malheureux, bien tourmenté !… J’ai remarqué parfois de la tristesse en lui. C’est cela… Cette petite dévergondée le poursuit. Hier encore, sous nos yeux mêmes, n’a-t-elle pas osé exiger un entretien ? Ah ! c’est abominable ! Je comprends tout maintenant.

Elle se leva tout à coup, et, d’un ton sec : — À présent, ma fille, j’ai un conseil à te donner. Appuyant la main sur le bras de Lucie, et parlant d’une voix basse et sifflante, tandis qu’elle lançait à sa nièce des regards foudroyants : C’est qu’il est de tou-oû-te in-côn-ve-nan-ce qu’une jeune fille se mêle de semblables choses, et que je ne m’explique pas… qu’il m’est impossible de comprendre comment il se peut faire que tu t’entretiennes de pareilles choses avec M. Michel.

Elle quitta le bras de Lucie pour aller vivement tirer le cordon de la sonnette ; puis, revenant à la jeune fille :