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VI


Le lendemain Lucie remarqua chez Michel un grand changement. Il n’était plus gai ni communicatif ; il mangeait à peine. Son regard si clair et si pur était abaissé. Il semblait honteux et ne regardait Lucie que furtivement.

— Qu’a-t-il donc ? se demanda-t-elle. Est-ce le souvenir de son impolitesse d’hier ? Mais il l’a réparée. Peut-être est-ce à cause de la superstition qu’il a montrée dans notre rencontre avec le tailleur ? mais son courage n’en a été que plus grand. Tant d’autres à sa place se seraient sauvés à toutes jambes, ou se seraient trouvés mal de peur. Moi-même j’éprouvais un saisissement involontaire, et je n’aurais pas été si brave sans la présence de Michel.

Elle profita de la réserve du jeune homme pour l’examiner à loisir, en le comparant à Cadet Mourillon, qui, disait-on, faisait la cour à Gène. Le résultat de l’examen fut cette exclamation intime : Quelle différence ! Cadet est ce qu’on appelle un beau garçon, pour signifier un homme grand et fort qui n’est pas laid, tandis qu’outre les avantages de la taille, Michel a une figure si intelli-