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comme c’était joli, je voudrais y être encore. Ils chantaient menu, menu comme des cheveux, et moi j’étais ben aise, allez. Enfin, quoi ? pour vous le dire, personne m’ôtera de l’idée que c’était le paradis.

— Bah ! allons ! allons !

— Ouah !

— Croyez-vous ?

Cette dernière assertion rencontrait évidemment beaucoup d’incrédulité, non tant pour la chose elle-même qu’en raison de celle qui parlait.

— Fallait au moins que vous fussiez ben jeune dans ce temps-là, observa une des assistantes !

— Eh ben ! voyez-vous, pour ce qui est de la maladie, c’était un sort. Nous avions une voisine qui était sorcière. Un jour elle me dit, qu’elle dissit, viens, qu’elle dit, viens aux champs avec moi. Moi, j’y allai donc. Elle avait comme ça des lopins dans sa poche, des croûtes qu’elle donnait à sa chèvre. En veux-tu ? qu’elle dit. Veux ben, que je dissis. En mangeai donc, et tout d’abord me v’là malade.

— Voyez-vous !

— C’était ça !

— Pardine !

— Vot’ mère fuit (alla) chez le devin ?

— Non point ; v’là comme ça se passa. La sorcière voyait ben que tout le monde lui voulait mal à cause qu’elle m’avait jeté le sort ; quelques-uns même songeaient de lui jeter des pierres ; elle eut peur, et v’là qu’un jour, — je m’en souviens comme si c’était hier, — elle entre et dit à ma mère : Comment va votre fille ? comment va-t-elle ? faut, qu’elle dit, lui faire une soupe à l’oignon. La v’là donc qui prend la poêle et qui me fait une soupe à l’oignon. Qu’a-t-elle mis dedans ? ma mère le vit point, et jamais personne le saura. Elle m’en ap-