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beau rafraîchit son âme, et, se trouvant tout à coup à l’étroit dans la maison obscure, elle s’en alla sous le soleil qui rayonnait dehors.

Au jardin elle rencontra Michel qui bêchait avec ardeur.

— Quoi ! dit-elle au jeune paysan, vous n’êtes pas allé vous reposer dans la grange avec les autres ?

— J’étais pas fatigué, mam’zelle Lucie ; et comme j’ai vu que vot’jardin avait besoin d’un coup de bêche……

— Oh ! certainement, dit-elle, il devrait être ensemencé déjà ; mais c’est la faute de Luret qui s’était engagé à le faire pour s’acquitter d’une petite somme qu’il doit : or il ne vient pas.

— Luret ! oh bien ! s’il vous doit de l’argent, il ne viendra pas, et vot’jardin, mam’zelle Lucie, restera cette année en friche. Ça serait dommage pourtant. Voulez-vous que je vienne y donner un bon coup la matinée du dimanche ?

— Oui… dit-elle en hésitant, car elle eût voulu parler d’une rémunération, mais elle n’osait pas. Depuis qu’elle savait l’histoire de la fille de Martin, elle éprouvait de la timidité vis-à-vis de Michel.

Obligeant comme il était, elle ne voulut point le laisser là tout seul pendant qu’il travaillait pour elle. Elle s’assit donc sur le tronc presque horizontal d’un pommier tortu et couvert de mousse, et offrit à Michel de lui prêter des livres.

— Oh ! mam’zelle Lucie, s’écria-t-il, vous ne sauriez me faire plus grand plaisir !

— Vous aimez beaucoup la lecture ?

— Oui, ça me fait du dimanche un jour de fête, et j’en ai pour toute la semaine à y repenser.

— Vous n’allez donc pas au cabaret, vous, Michel ?

— Oh ! je ne peux pas dire, mam’zelle Lucie, que j’y mette jamais les pieds, comme ça, pour contenter un ca-