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tant cet appel, si promptement obéi d’ordinaire, elle semblait aussi ne pas l’entendre.

— Vous ne répondez pas ? répéta Julien. Oh ! je le vois, je vous ai fâchée ! Oui, c’est trop d’orgueil à moi ! je me le disais, mais je n’ai pu m’empêcher…

— Est-ce qu’on épouse une religieuse ? dit-elle enfin, rappelant ainsi — était-ce méchamment ? Non ; plutôt, je crois, pour cacher son trouble, — ce qu’il avait dit à Annette les premiers jours.

— Ah ! s’écria-t-il, quoi ! cela ne se peut pas ? serait-ce vraiment impossible ?

L’accent de sa voix était si ému, si déchirant, qu’elle ne put s’empêcher de se retourner vers lui, et le voyant si pâle, si malheureux, si craintif, elle n’eut plus de doutes sur son amour…

Quelques semaines après, on célébra leur mariage, qui fut civil seulement. Elle avait fait bien du chemin, sœur Sainte-Rose, depuis le jour où elle demandait en pleurant à la Sainte Vierge la permission d’aimer de pauvres enfants ! Ses idées avaient en effet beaucoup changé ; mais elle n’en était pas moins restée pieuse, car la piété, religion du cœur, est d’ordre humain, comme toutes choses de notre monde. Plus éclairée maintenant, plus intelligente, elle n’en savait que mieux aimer, et l’ordre humain aussi a ses choses sacrées.