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Rose dût passer à M… la journée du lendemain. Elle ne pouvait, renonçant à son voeu d’obéissance, garder plus longtemps l’habit religieux. La bonne femme chez qui elle logeait fut donc chargée d’acheter de simples habits de ville, que sœur Sainte-Rose revêtit, non sans douleur. Comme toutes les natures peu cultivées, qui embrassent rarement d’un seul coup d’œil toutes les conséquences de leur décision, le fait extérieur avait à ses yeux une grande importance, il accentuait l’acte et même, à bien des égards, le révélait sous un jour nouveau.

Elle pleura de quitter le saint habit et d’être vêtue de manière mondaine. À se voir passer dans le miroir de sa petite chambre, ne se reconnaissant plus, elle avait honte. Elle souffrait de sentir son front nu frappé par l’éclat du jour, et regrettait la vaste coiffure, dans laquelle s’abritait si commodément autrefois son impressionnabilité un peu sensitive. Un son de voix, un mouvement, un rien, faisait passer incessamment sur ses joues des rougeurs plus ou moins vives, et ses paupières, seul voile qui lui restât, s’abaissaient à chaque instant.

Avec cela son hôtesse, qui aimait à causer, ne lui épargnait pas les remarques. Elle s’émerveillait maintenant que sœur Sainte-Rose n’eut pas plus qu’une autre l’air d’une religieuse, mais d’une jolie fille tout simplement, « sauf, qu’avec son air timide, elle ne portait pas plus de vingt ans. » Elle eut soin aussi de lui apprendre que toute la ville était en rumeur à cause d’elle, et que l’on en di-