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Feuilleton de la République française
du 1er octobre 1874



(15)[1]

MARIE LA LORRAINE

NOUVELLE

CHAPITRE VIII

L’INVASION

Ce même soir, la famille Chazelles achevait tristement son souper ; il était près de dix heures, quand on entendit frapper à la porte. Il y avait dans toutes ces pauvres âmes tant de craintes et de tourments, que ce bruit, quoique faible, fit tressaillir tout le monde. Les hommes se levèrent, les femmes pâlirent, et seul le petit Pierre, qui déjà dormait à moitié, leva la tête d’un air tranquille et curieux ; car les enfants n’ont point de défiance de l’inconnu, où toute leur vie à venir repose.

Ce fut un visage ami qui se présenta, et Marie eut une nouvelle sensation au cœur, mais plus douce, en voyant entrer Louis Brésy.

— Pardon, excuse, dit il, maître Chazelles, si je vous dérange par ma visite ; mais, après le conseil que nous avons tenu, chacun de nous a reçu mission de taire la tournée de son côté, et j’ai déjà parlé à plusieurs par ici. Je viens donc vous dire, si vous voulez l’entendre, ce que nous avons arrêté.

— Bien sûr, dit Chazelles, nous voulons l’entendre, et je vous sais bien obligé d’être venu. Asseyez-vous à table, Louis Brésy, et prenez un doigt de vin avec nous.

Louis ne voulut pas refuser les avances de maître Chazelles ; mais à peine trempa-t-il ses lèvres, et, tout sérieux,

  1. Voir la République française des 9, 10, 12, 13, 14, 16, 17, 20, 51, 23, 24, 26, 27 et 30 septembre.