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gent au-dessus des jardins et sont magnifiques à voir sous les flots de lumière dont le soleil inonde leur fraîche verdure.

La maison est une sorte de château du dix-huitième siècle, que, par un compromis plein de justesse, les paysans nomment le logis. Sa façade a deux pavillons, une porte ornée d’écussons, de hautes fenêtres. Les chambres sont vastes, et partout règne cette ampleur de proportions qui me semble agrandir la vie domestique. Ce fut bâti sous Louis XV, par un marquis amoureux de la chasse, qui venait passer un ou deux mois de l’année dans ce pays plein de bois et de bruyères, presque désert alors, et maintenant encore abondant en gibier. Tout le rez-de-chaussée, excepté le salon, est tendu de belles tapisseries à paysages, ornés d’oiseaux flamboyants. Le salon, arrangé suivant le goût moderne, n’en est pas plus beau. Ce papier fond gris, à arabesques vertes et à fleurs roses, est une parure mesquine pour ces hauts et larges jours ; les fauteuils et les canapés de velours sont beaucoup trop à l’aise dans cette vaste pièce ; les brimborions amassés par la tante Clotilde y tremblotent, et la large cheminée de marbre sculpté est fort tristement gâtée par l’appareil du chauffage économique.

Tel qu’il est cependant, ce salon fait l’orgueil de la famille, et les raisons d’une prudente économie ont seules empêché la transformation complète du reste de la maison. On m’a donné la plus belle chambre, une chambre que tu connais sans l’avoir vue, parcequ’elle ressemble à toutes les chambres, et que je changerais volontiers contre une de ces salles, comme il y en a deux ou trois