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roues est en l’air, tandis que l’autre s’enfonce à la recherche du point exact où l’équilibre doit manquer. Notre cocher allait d’un train superbe au milieu de tout cela et je regardais les dames dont le sang-froid m’étonnait.

— Nos chemins ne sont pas beaux, dit M. Plichon ; c’est la faute de ces diables de paysans du conseil municipal, des imbéciles, pleins d’idées étroites et ne faisant qu’à leur tête ; l’utilité publique n’existe pas pour eux ; ça ne connaît pas même l’intérêt de clocher, mais seulement celui de sa ferme. Encore…

Il me fit un amer tableau des vices des campagnards.

La campagne en ce cas ne leur ressemble point. Dieu ! quelle fertilité, quelle douceur, quelle charmante et bonne nature ! Prairies où se balancent les peupliers, coteaux tantôt riants, tantôt abruptes, plaines couvertes de chaume après moisson et bordées de grands chênes ou de grands ormeaux ; partout des groupes de feuillages, des fermes, des bois. En approchant du Fougeré, ce fut une autre beauté, dont j’aime la sauvagerie ; de grands espaces incultes, couverts de bruyères, où la calèche roulait silencieusement.

Ce pays est une suite de plateaux, coupés par des ravines, qui de plis en plis descendent aux rivières.

L’habitation du Fougeré est assise au bord d’un de ces plateaux. Les jardins, situés à l’est et au midi, s’inclinent en pente douce vers les bords du Malignon, tandis que devant la façade au nord une belle avenue de châtaigniers projette sa ligne droite au milieu des champs, et qu’à gauche s’étend une vaste plaine. Autour de nous l’horizon est très-vaste, sauf du côté des bois, qui s’éta-