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cher William, nous avons contre nous assez d’obstacles ; il ne faut pas nous entraver nous-mêmes. Et toi qui te plais tant à railler les préjugés, tu possèdes là un préjugé de roman qui n’est pas soutenable. C’est précisément parce que l’amour a peu de durée, comme tu le reconnais si bien, que le mariage doit être, au point de vue des intérêts — de ces intérêts qui constituent le fond de l’existence — une affaire sérieuse et solide.

Sache donc au plutôt qu’elle est la fortune de cette jeune Blanche. Et si elle n’en avait pas, dans son intérêt comme dans le tien, retire-toi. Elle pleurera quelques jours et retrouvera ensuite la faculté d’être heureuse avec un autre. Donne-moi seulement l’adresse exacte de son père et je saurai bientôt à quoi m’en tenir. Nous trouverons à Paris pour toi des partis superbes. Réfléchis, je t’en conjure, mon cher William.


TREIZIÈME LETTRE.

WILLIAM À GILBERT.

28 juillet.

Je vous avais prié de garder vos conseils, qui, trop profonds sans doute, ne sont pas à ma portée. Mais vous vous obstinez. C’est toujours cette persécution stupide qui, sous prétexte d’amitié, se croit le droit de haute et basse torture. Je ne vous en veux pas, cependant. Vous m’avez réveillé brutalement d’un rêve délicieux, mais j’avais tort de m’y plonger. Ne m’écrivez plus ici, je pars.