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sard. Blanche, mariée depuis plus d’un an avec Prosper, habitait Paris.

Pendant l’hiver, je fis entourer le domaine d’un large fossé bordé d’aubépine et planté d’ormeaux, de pommiers et de cerisiers. Édith a voulu que les belles bruyères détruites par notre charrue eussent asile sur la jetée, où toutes leurs variétés fleurissent en un cordon charmant. Nous allâmes au printemps habiter la ferme et planter notre jardin.

La récolte de 1849 fut magnifique. Nos quarante-cinq hectares, ensemencés en froment et seigle, nous rendirent quatre mille cinq cents doubles décalitres, valant onze mille deux cents francs. Mais ne va pas prendre ce chiffre pour celui du revenu net ; car les dépenses de la récolte et du battage, l’achat d’une machine, le gage et la nourriture des domestiques et des bestiaux, le réduisaient à douze cents francs à peine, et je devais en automne consacrer une forte somme, près de cinq mille francs, à la création de prairies artificielles, qui m’affranchiraient enfin de l’obligation d’acheter tous les ans pour un millier de francs de fourrages, en sus des légumineuses que la ferme fournissait.

Je ne veux pas te fatiguer par le détail de progrès peu appréciables pour toi, mais délicieux, même dans leur lenteur, pour ceux qui les créent eux-mêmes. Les soirs de printemps, en nous promenant autour de nos blés, en épiant les progrès de la prairie, tandis que les oiseaux chantaient leur couchée et que les travailleurs revenaient des champs, les harmonies de la nature nous semblaient plus suaves et plus pénétrantes. Nous n’en jouissions