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lisant ta lettre. Oh ! mon pauvre Gilbert ! comme tu t’es fait souffrir ! Je t’attendais depuis bien longtemps et ne pouvais comprendre ton silence. J’ai voulu souvent t’écrire ; mais je te croyais fâché contre moi, je n’osais te parler de mon bonheur, de tout ce qui m’occupait… Je vais donc être tout à fait heureux ; car il faut que tu viennes avec nous. Édith te recevra en frère. Oui, mon ami, nous avons un enfant, un garçon qui est fort et marche déjà. Il est sérieux comme sa mère, à laquelle il ressemble ; mais il rit aussi de grand cœur quand nous jouons lui et moi. Tu le verras. Nous préparons ta chambre. Viens vite, et nous causerons.

Mais je veux te donner, en attendant, tous les détails que tu demandes. Va, j’ai toujours un grand plaisir à causer avec toi, et tu me trouveras aussi bavard que par le passé. Je vais te mettre au courant de tout ce qui m’est arrivé depuis notre séparation ; quand tu arriveras au milieu de nous, tu n’auras rien à apprendre ; il semblera que nous ne nous sommes point quittés.

Je partis du Fougeré à la fin de janvier 1847, après avoir commencé déjà l’exécution de mon plan, en achetant cent hectares de bruyères incultes, au prix de vingt-sept mille francs. Ces terrains s’étendaient des bords du Malignon jusqu’à un bouquet de bois, vers le milieu de la lande, et formaient une seule pièce, d’immense étendue. Mais le terrain ici se vend peu cher et l’on tire de ces terres incultes si peu de profit, que le propriétaire auquel j’eus affaire s’en défit avec plaisir, pour acheter ailleurs. Cette première mise de fonds n’était que la moindre chose ; il fallait défricher, puis bâtir la ferme. Leyrot était devenu