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acquis un revenu capable de subvenir à l’entretien d’un ménage et d’une famille. Faut-il l’avouer, je songeais déjà aux bienfaits possibles de cette absence, à l’influence croissante que pouvait obtenir Prosper, aidé des 150,000 francs qu’il possède dit-on ; mais le sort est contre moi et je n’ai plus qu’à m’abandonner à ses décisions : hier, je reçois de la part du secrétaire du duc l’avis de ma nomination comme employé dans les bureaux du ministère de l’instruction publique, 3,000 fr. d’appointements.

J’aurais dû, j’y pense à présent, déchirer cette lettre et n’en tenir compte ; mais mon premier mouvement n’est jamais la ruse, et quand maman me demanda :

— Que vous apporte donc cette grande enveloppe, William ?

Je lui présentai bêtement la lettre. Son cri de joie m’avertit de ma folie.

— Ah ! voilà qui vous sauve. Blanche et vous, dit-elle. Dieu soit béni !

Blanche aussi parut charmée ; tout le monde me félicita ; je m’efforçai de sourire et faillis me trouver mal.

N’oublie rien, cher Gilbert, de tout ce que j’ai demandé.


CINQUANTE-SEPTIÈME LETTRE.

GILBERT À WILLIAM.

31 décembre 1846.

À mon tour de réclamer ta compassion, William. Je me croyais au comble du bonheur ; tout est perdu. Je ne sais pas quelle est la plus forte de ma douleur, ou de ma colère. Et ce qui m’accable encore le plus, c’est que