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riage, tout en montrant au doigt les courtisanes et les escrocs ? Pour moi, quand je serai décidé à épouser une dot quelconque, j’irai auparavant baiser humblement la pantoufle de mademoiselle Nina, votre coryphée de la Chaumière, en lui disant : Madame, je ne suis ni un imbécile ni un tartufe, mais un misérable fort abject, et je viens rendre hommage à votre supériorité morale sur moi. Vous vendez votre corps, c’est vrai, mais vous ne trompez personne, tandis que j’ai fait croire à une jeune fille que je l’aimais, et je lui ai volé son âme pour m’emparer de son argent.

— Dis tout ce que tu voudras, je ne puis me résoudre à retourner à Paris si promptement. Je quitte pourtant Royan, où je ne puis rester pour plus d’une raison. Adresse-moi tes lettres à Saint-Palais. C’est un village des environs de Royan. Je vais m’établir là pour quelques jours, d’abord pour rompre avec mon hôtel et mes habitudes de grand seigneur, chose urgente, puis afin d’être seul et de songer en paix à ce que j’ai à faire. Envoie-moi tous les détails. Je dois tout savoir. Me reste-t-il peu ou rien ? Dieu merci, je n’ai point de dettes.


HUITIÈME LETTRE.

WILLIAM À GILBERT.

Saint-Palais, 18 juillet.

J’ai le spleen et t’écris pour sortir un peu de moi-même. La solitude ne m’est pas bonne. Il y a quelques années, je l’aimais tant ! Mais elle ne convient qu’à ceux