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dès à présent, mon cher William, il faut t’avouer que tu n’es plus riche et songer à te créer de nouvelles ressources. Ah ! si tu voulais te laisser guider un peu ! Mon désespoir, c’est ce caractère fantasque et intraitable qui te conduit toujours à l’opposé de tes intérêts. Je gémis de voir ce qu’il faudrait faire, et de ne pouvoir l’obtenir de toi. Je t’envoie quatre cents francs. Si tu n’en as pas assez, demandes-en davantage, mais reviens à Paris le plus tôt possible. Il faut que nous causions ensemble. J’aurais bien voulu t’aller chercher ; mais ma position ici est plus épineuse qu’on ne peut l’imaginer. Cette belle Olga, vois-tu, m’a fait un peu son esclave. Elle a sans cesse besoin de moi, ce qui, après tout, est bien flatteur. Je ne peux lui parler beaucoup de toi sans que tu me l’aies permis, et dans les circonstances présentes, ce voyage pourrait me brouiller avec elle.

Sais-tu que je l’admire et l’envie plus que je ne l’aime ? Et puis, je te l’avoue, par moments, je désespère de cette conquête. Il faudrait, je crois, un caractère plus fort que le mien pour dompter cette âme impérieuse. C’est une noble et belle créature, je te l’ai dit ; seulement, comme elle a deviné combien je tenais à elle, elle se plaît à en abuser. J’en suis presque arrivé à cette conviction que je dois renoncer à l’espoir de l’épouser. Et c’est dommage. Rien qu’à en juger par le luxe de ses diamants, sa fortune est effrayante. Comme femme, tu la verras et je suis certain qu’elle te frappera par sa beauté, en même temps qu’elle te charmera par l’audace de ses idées, la bizarrerie même de son caractère et ses talents. Elle a un front superbe, des yeux ad-