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ble, confusément, à travers les brumes de la rêverie.

Édith m’a raconté sa vie, hier, dans une promenade où nous nous sommes rencontrés. C’était bien hier. Depuis qu’elle m’a donné sa confiance et son amitié, les jours sont si pleins qu’ils me semblent valoir beaucoup d’autres jours. Elle sort toujours vers quatre heures et je la rencontre aux environs de la cabane du vieux, où souvent nous nous asseyons. Il nous apprit hier que la pauvre Mignonne s’est empoisonnée en mangeant des baies vénéneuses, parce que Justin, vaincu par son père, ne la voit plus et va épouser la fille d’un riche. — Pauvre fille ! dit Édith, et elle resta triste et silencieuse quelque temps, après quoi elle se leva et sortit de la cabane.

Nous avions fait à peine quelques pas ensemble qu’elle me donna la main comme pour me quitter.

— Vous ne revenez pas à la maison, demandai-je avec tristesse ; car je souffrais de la perdre déjà.

— Non, répondit-elle, et elle s’éloignait, quand je la vis se retourner au bout de quelques pas. Eh bien, si vous le voulez, venez avec moi, William. Mais c’est un peu loin.

— Où allez-vous donc ?

— Voir cette pauvre Mignonne.

— Ah ! bien, chère Édith. Vous êtes donc aussi compatissante pour les peines d’amour ?

— Et pourquoi pas ?

— C’est que… je le crois du moins, vous ne les avez pas comprises ?

Elle sourit :

— Je les ai effleurées, William. J’ai voulu aimer et ne