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ticulier au général, et n’érige pas en axiome un accident de ma vie. Hermance m’a seulement servi de leçon, elle m’a appris à voir. Et depuis, j’ai lu tant de tristes choses dans d’autres cœurs ! Ce dont j’ai besoin, moi, je n’y puis rien, c’est d’amour. Or, je ne trouve partout qu’égoïsme et calcul.

Qu’il est profond ce mot d’Hermance quand je lui dis — ce que je croyais compris entre nous — que dans ma pensée nous étions elle et moi unis pour la vie, et que j’attendais seulement pour l’épouser le consentement de mon père. — Oh ! si j’avais su ! s’écria-t-elle. — Dieu merci, elle ne sut pas. Elle eût pu me rester fidèle matériellement comme épouse qu’elle m’eût trompé en ne tenant à moi que pour ma richesse et mon nom.

Oui, la candeur et la naïveté de cette jeune Blanche me troublent profondément. Elles raniment en moi ces espoirs qui furent des croyances. Oui, la foi, la pudeur, la sincérité, ont forme visible en elle. Mais, qui me répond que tout cela est autre chose que duvet de pêche, éclat de fleur ? Cette délicieuse enfant s’ignore elle-même. Peut-elle promettre l’avenir ?

Voici une bien longue lettre. Je viens de balancer si je la garderais pour moi, ou si je te l’enverrais. Mais il te faut une réponse. J’espère que tu la trouveras dans tout ce qui précède. Parle-moi donc de ta princesse. Je te quitte pour aller au bain, où Blanche m’attend. Car on se baigne ici hommes et femmes tous ensemble, et c’est du dernier pittoresque. — As-tu trouvé Frabert ? Tous frais soldés, je n’ai presque plus d’argent.