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— Eh ! le drôle ! a dit la petite maman, gonflée d’orgueil, en l’essuyant après coup.

À la bonne heure ! le drôle ! j’aime mieux ça.


TRENTE-QUATRIÈME LETTRE.

WILLIAM À GILBERT

9 septembre.

Nous parlions des chrysalides, et il me vint cette idée que la nature nous a donné peut-être dans ces transformations la forme du travail invisible de la mort. Édith a levé la tête et son grand œil rêveur s’est fixé sur le mien. Blanche a souri comme si elle ne comprenait pas, et Clotilde s’est écriée :

— Quelles superbes idées vous avez, William !

Ce mot m’impatienta et je rouvris le livre, car rien n’est rapetissant comme l’immixtion de la personnalité dans le domaine de la pensée. Mais Clotilde reprit aussitôt :

— Cette belle nature, dont vous êtes si enthousiaste, ce qu’on y rencontre à chaque pas, c’est la mort.

— En effet, répondis-je, et cela doit être, puisque tout y est mouvement et transformation. Mais pourquoi la mort vous effraye-t-elle ? Savez-vous ce que c’est ?

— Pas beaucoup, sinon que c’est une souffrance.

— Non, cela n’est pas prouvé. La souffrance existe surtout dans la vie et par la vie. Il faut souffrir pour enfanter, pour se développer, pour acquérir, pour vaincre ; la maladie ordinairement précède la mort ;