selle Ménier ; mais pour la jeunesse et la beauté, quelle différence !
Il me fixait ; j’eus l’air d’être embarrassé, et de vouloir détourner l’entretien :
— Mais, dis-je, il y a la sœur aînée qui doit se marier auparavant.
— Édith, s’écria t-il, Édith ne se mariera jamais. Et quel homme sensé voudrait d’une telle femme ! C’est une haute intelligence assurément, mais il lui manque le plus bel apanage de la femme, le cœur. Ah ! le cœur ! c’est le charme de la femme, sa vertu, sa force, sa religion ! Sans le cœur, la femme n’existe pas. Ce n’est plus qu’un monstre, oublieux de ses devoirs, de ses véritables intérêts, qui sont de se dévouer à l’homme. Une vraie femme de cœur, ajouta-t-il en m’observant, c’est mademoiselle Clotilde. Ah ! si bonne ! si empressée, toujours prête à se sacrifier à ses propres délicatesses, ou à ceux qu’elle aime. Et quelle sensibilité !
J’allais dire que peut-être elle la déployait avec trop de luxe, quand l’esprit de mon rôle me revint.
— Une sensibilité adorable ! m’écriai-je en levant les yeux au ciel.
— Et savez-vous, reprit-il, qu’avec ses airs de vieille fille, qu’elle prend trop tôt, elle est encore belle ?
— Encore ! répétai-je avec indignation ; je le crois bien, mademoiselle Ménier n’a pas trente ans.
Mon homme ne put retenir un mouvement des yeux et des lèvres qui signifiait : — si elle se rajeunit, elle veut donc lui plaire ; — et je le vis décidément mortifié, ce qui me charma.