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Je suis un fou. Je ressemble à l’enfant qui veut la lune ; moi, je veux ce qui n’est pas. J’aurais besoin de vivre dans les étoiles, et je suis ici. Voilà tout, je m’en vais toujours trop haut, puis je retombe. Ce n’est la faute de personne ; c’est ma faute à moi.

Je sais enfin la cause de cette tristesse et de ces bouderies de Blanche qui durent depuis deux jours. C’est en vain que plusieurs fois je l’avais interrogée. Elle s’obstinait à répondre que ce n’était rien, et j’étais mécontent, car je ne pouvais la croire, et je possède pourtant quelques droits à sa confiance. Les autres d’ailleurs, aussi bien que moi, s’apercevaient de son changement d’humeur. — Y aurait-il déjà quelque brouille ? me demandait M. Plichon — et je m’apercevais que la mère et la tante interrogeaient Blanche. Elle s’est enfin confiée à la tante Clotilde, et c’est par celle-ci que j’ai appris ce que Blanche aurait dû me dire elle-même : Depuis notre conversation du bois, elle redoute mon goût pour la campagne, et serait au désespoir de ne pas habiter Paris.

— En vérité ! dis-je un peu ironiquement. Comment Blanche a-t-elle pu croire que je voulusse la réduire au désespoir ? Cependant je ne puis promettre absolument d’habiter Paris ; car il serait possible qu’on ne m’y offrît point de place, et que j’en obtinsse ailleurs.

— Ah ! tant pis, ce serait pour Blanche une grande déception, dit la tante Clotilde.

— C’est avoir le cœur bien vaste, répondis-je, que de pouvoir y loger à côté de l’amour plusieurs autres sujets de grande déception.

— Mais n’allez pas vous susceptibiliser. Blanche vous