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pourrais-je acheter des terres voisines du Fougeré, devenir en outre le fermier de votre père, prêcher d’exemple d’abord, et, sinon accomplir mon rêve, car il y faudrait plus que la vie d’un homme, du moins, en commencer la réalisation ? Nous resterions ainsi près de votre famille, ce dont je serais heureux presque autant que vous.

— Ce serait charmant ! s’écria-t-elle avec un dépit qu’elle ne pouvait dissimuler, et qui m’étonna.

J’ai raconté aussi ma rencontre avec la pauvre femme, et ce qu’elle m’a révélé de sa misère.

— Oh ! dit Blanche, ce doit être la Cholette. Oui, elle est très-pauvre ; mais il ne faut pas, William, croire absolument tout ce que disent ces gens-là. Ils se plaignent toujours.

— Et de quoi se loueraient-ils ? m’écriai-je, leur connaissez-vous quelque bonheur ?

— Je ne sais pas ; moi je les connais très-peu. C’est maman qui leur a fait quelquefois des charités et à qui j’ai entendu dire qu’ils ne méritaient guère qu’on s’occupât d’eux.

Le calme et l’insouciance de cette belle enfant, qui vit comblée de biens au milieu des misérables, me firent mal ; je me tus, mais je tombai dans une tristesse invincible. Elle voulut remettre la conversation sur le ton de ces mièvreries amoureuses qui remplissent à l’ordinaire nos courts entretiens ; à peine pouvais-je lui répondre.

— William, me dit-elle d’un ton très-doux et très-tendre, qu’avez-vous donc ?

Et elle me prit la main. Dans cette étreinte, dans son