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que vous sachiez que ce qu’on achète au loin est toujours plus beau, et puis ce sont là toutes nos fêtes, à nous autres, gens de campagne. C’est une, deux, trois lieues à faire, dans la poussière ou la boue, le matin, et derechef le soir ; c’est une journée de travail perdue, le plus souvent sans aucun profit, et sans compter la dépense, qui se monte toujours à quelques sous ; mais, que voulez-vous ? on a mis sur soi ce qu’on avait de plus beau ; on s’est pavané ; on s’est regardé passer les uns les autres ; on a revu de vieilles connaissances ; on a contemplé les belles choses dorées et peinturlurées des marchands, et s’il s’est trouvé là quelque charlatan, ou bien quelque comédie, avec une grosse caisse qui bat d’un côté, pendant que le violon fait aller les danses… Ma foi ! ça vous achève de griser les gens, et l’on revient de là tout joyeux et tout rafraichi. Car enfin, c’est là un jour qui ne ressemble pas aux autres, et, tels que le bon Dieu nous a voulu faire, il nous faut entre temps quelque changement.