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tremblant et comme fou. Mais elle semblait ne pas l’entendre, et seulement quand ils furent derrière les noisetiers, elle se retourna :

— Je voulais, moi aussi, te parler, Baptiste, lui dit-elle, et je te remercie de m’avoir cherchée, quand même tu me crois traîtresse envers toi. Je n’ai jamais cessé de t’aimer, et, de cœur, je mourrai tienne. On nous a volé à tous deux notre croyance. Je n’ai jamais reçu que deux lettres de toi, les deux premières ; les autres, par le conseil du tailleur, qui voulait m’avoir pour femme, ont été brûlées ; on m’a fait croire que tu m’oubliais. Je t’ai écrit, ensuite de cela, deux fois, et n’ai point eu de réponse, et tes parents m’ont chassée de leur maison. De tant de peine j’ai failli mourir ; quand la santé du corps m’est revenue malgré moi, je n’étais point encore tout à fait vivante, car je n’avais souci de rien sur la terre, me croyant délaissée par toi ; et c’est alors que pour obéir à mes parents et sauver leur bien, je suis devenue la femme du tail-