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autorisent les reproches que fait à son tour le peuple aux bourgeois libéraux, quand il les accuse de n’être en démocratie que des amateurs, qui récoltent volontiers les applaudissements et les profits, mais s’esquivent dès qu’ils craignent de se compromettre ; qui vont en avant, tant que leur intérêt ou leur vanité y trouve son compte ; mais qui lâchent le peuple, qu’ils ont engagé à les suivre, dès qu’ils voient les choses tourner sérieusement, et menacer leur caisse ou leur considération — dans ce monde comme il faut, où ce qu’on appelle les convenances prime la foi et le véritable honneur. Il prétend encore — c’est toujours le peuple qui parle, — que le cœur manque à la plupart de ces hommes pour comprendre ses souffrances à lui, et pour vouloir autre chose que ce qui leur manque à eux-mêmes. Il se rappelle qu’entre les mains de tels chefs, ses révolutions se sont toujours tournées en compromis politiques, où ses droits seuls ont été oubliés ; il en conclut de la différence des conditions à celle des sentiments, et n’est pas loin d’envelopper sous le même titre tous ceux qui ne sont pas avec lui. — Jugement injuste quant aux intentions personnelles ; mais juste en ce sens, qu’à l’époque où nous sommes, quand les situations sont devenues si tranchées, quand l’heure est si décisive, les compromis ne sont plus possibles.

D’autre part, il faut reconnaître que les démocrates avancés, que les socialistes, en général, méritent un reproche précisément tout contraire par leur volonté inébranlable d’appliquer dès le lendemain, la vérité qu’ils ont ou qu’ils croient avoir découverte la veille. Ils sont dans cette erreur, qui me paraît très fatale, de croire qu’on peut violenter l’opinion pour aller plus vite. — Je