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riser la cause par le bruit de ces dissensions. Il faudrait enfin renoncer à ses défauts, ce qui évidemment est difficile, et à ses préjugés, ce qui ne l’est pas moins ; mais ce qui pourtant ne serait pas impossible à des hommes en marche sur la route de l’idée et du progrès. Le plus difficile, comme en toutes choses, est le premier pas de la mise en question des choses établies ; mais l’esprit qui a fait cet effort peut les faire tous, pourvu que son mobile soit la recherche sincère.

Aussi, n’est-ce qu’aux sincères que je m’adresse, laissant les autres railler de telles illusions ; c’est à ceux qui sentent l’imminence du péril où est la France, où est la révolution dans le monde entier ; et qui souffrent au plus profond de leur âme, de tant de fautes et de puérilités de ce côté, de tant de crimes de l’autre ; de la démoralisation croissante, en face de tant d’abjurations et de trahisons ; du doute mortel qui envahit la conscience humaine ; à ceux qui ont trouvé des leçons dans les spectacles que nous avons sous les yeux ; à ceux-là surtout qui voient, qui sentent venir, au loin, l’épouvantable bataille, où les appétits matériels d’en bas se vengeront à la fin des appétits matériels de ce qu’on appelle en haut et seront sans frein, comme les autres ont été sans pitié ; la guerre sanglante, féroce, inexpiable, comme celle qui vient d’avoir lieu — mais plus décisive, car les aristocraties ne peuvent pas exterminer le peuple, mais le peuple peut exterminer les aristocraties.

Et comment s’étonnerait-on qu’à force de tels exemples, ce peuple perdit ce qu’il a, dans sa misère, de patience, d’idéal et de bonté ? Est-ce donc à cause de son ignorance qu’il serait obligé à plus de vertu ? Qui