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fuse même le droit d’asile, en alléguant la morale outragée et la sainte pudeur ! — Quelle est donc cette morale ? Que signifie cette justice ? Qu’est devenu le sens des mots ? Ce monde se dit sceptique ; ce siècle se prétend incrédule ; et il croit aux larmes des Thiers ! aux indignations des Jules Favre ! à la sensibilité des bourreaux et aux serments des faussaires ! Pourquoi pas à l’honneur des Louis Bonaparte ?

Hélas ! la politique de cette malheureuse humanité ne consistera-t-elle jamais qu’en un changement de noms ?

Vous, messieurs, qui représentez ici la pensée intelligente des classes éclairées, qui croyez à la paix, qui croyez à la liberté, et par conséquent à la conscience humaine, votre devoir est de protester contre de tels crimes. Feindre de ne pas les voir, quand ils remplissent le monde, quand ce pays où vous êtes est semé des débris de ce naufrage, serait trop puéril et trop faux, et je le répète, votre devoir s’y oppose. Vous êtes la Ligue de la paix, et l’on égorge ! et les fusillades interrompues recommencent… à Marseille… bientôt à Versailles. Autrefois, c’était sans jugement ; à présent, ils y joignent une parodié de justice ; mais ce sont toujours les vainqueurs exécutant les vaincus. Vous êtes la Ligue de la liberté, et 40, 000 hommes sont entassés dans des cales ; et toutes les libertés, de nouveau, sont violées ; et la terreur, depuis quatre mois, règne à Paris ! C’est la vieille barbarie, victorieuse de tous les instincts du monde nouveau. Vous devez protester contre elle, et mettre au ban de l’humanité ces égorgeurs et ces proscripteurs.

Car, même abstraction faite de la liberté, vous n’êtes pas de ceux qui confondent la paix avec le silence, et