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Qui donc, depuis la fin de février jusqu’au 18 mars, presque chaque jour, au passage des trains dans les gares des campagnes, jetait ces bruits : On se bat dans Paris ! Paris est en feu ! Ce qui faisait dire aux paysans avec rage : — Après tant de malheurs, ces brigands de Parisiens ne nous laisseront donc point vivre en paix !

Qui donc avait employé les cinq mois du siége, les cinq mois du silence forcé de Paris, à persuader aux campagnards que c’étaient les républicains qui avaient forcé l’empire à la guerre ? et que les Parisiens, non seulement refusaient de se battre contre les Prussiens ; mais encore empêchaient Trochu de faire des sorties, par la nécessité de contenir leurs émeutes ?

Qui donc osa la répéter à la tribune, cette même calomnie effrontée, à la face de Paris indigné, devant la conscience révoltée de tous ceux qui avaient partagé les douleurs de ce siége, pires que les privations, et l’ardent patriotisme du peuple parisien, coupable seulement d’une patience et d’une crédulité trop grande, vis-à-vis de ses gouvernants ?

C’est ainsi qu’on excitait la France contre Paris, qui avait fait la République et la voulait maintenir. C’est ainsi qu’on flétrissait la victime avant de l’exécuter, et qu’on ruinait autour d’elle toutes les sympathies, avant de tendre le piége où elle devait périr. De l’aveu de tous les journaux modérés, l’attaque du 18 mars fut une provocation. Le départ immédiat du gouvernement, de tous les services publics, l’enlèvement des caisses et de tout le matériel de l’administration, montre un plan arrêté d’avance. L’émeute devint une révolution. Le grand courage du petit machiniste de ce drame ne faiblit pas. On