fois d’ailleurs que M. Favrart sembla s’occuper en particulier des nouvelles habitantes de la commune. Ses regards avaient la fixité rêveuse de ceux qui voient autre chose que ce qu’ils ont sous les yeux. De temps en temps, sa femme lui criait :
— Monsieur Favrart, offre donc à boire à ces dames !
Et M. Favrart s’empressait d’obéir, avec tant de courtoisie, qu’on pardonnait à un sentiment si vrai son manque de spontanéité. Du reste, ses convives ne s’occupaient guère plus de lui qu’il ne s’occupait d’eux. Comme il oubliait, on l’oubliait ; à Boisvalliers, l’on disait : Chez Mme Favrart.
Après le dîner, les hommes allèrent dehors fumer ; les trois dames serrèrent la cheminée, et Léontine Favrart, jetant le bras autour de la taille de sa nouvelle amie, l’emmena dans sa chambre. Là, après avoir débité une somme convenable de menus propos sur de menues choses, ce que les jeunes filles considèrent comme faisant partie de leur rôle social, Léontine, en poussant un petit éclat de rire, demanda à Sidonie comment elle trouvait ces messieurs.
— Mais… je ne sais trop, répondit l’institutrice.
— Oh ! la dissimulée… Voyons : vous avez pourtant assez causé avec votre voisin, et il ne m’a pas paru que vous le trouviez désagréable.
— Il m’a semblé bon garçon, mais… il lui manque… naturellement… une certaine éducation.
Léontine eut un nouveau rire fêlé.