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sée. Il est rare qu’au premier abord cette faconde n’en impose pas à tout le monde. Nous prêtons de l’idéal à tout inconnu.

Après le déjeuner, M. Maigret proposa une promenade. On alla du côté de la rivière. Mme Maigret n’en était point. À la campagne, la femme n’est pas la maîtresse de la maison, mais la première servante du ménage, ce qui est d’ailleurs bien plus en accord avec le Code et les mœurs. Un seul des enfants accompagnait son père et les hôtes. Tout à coup, M. Maigret se souvint d’un mot qu’il avait à dire à quelqu’un du village, et laissa M. Lucas et Sidonie seuls avec l’enfant.

Celui-ci, qui allait de çà et de là, courant, sautant, lançant des pierres aux oiseaux, n’était pas un tiers. Sidonie se sentit en face de la décision, et s’en troubla. Sans doute, cette impression se peignit sur ses traits : car M. Lucas la regarda en souriant, d’un air vainqueur. Il avait cérémonieusement offert son bras à Sidonie, dès le début de la promenade, et continuait de causer de lui ou des siens. Ils se trouvèrent alors à l’entrée du chemin des peupliers. L’enfant s’y engagea, et ils le suivirent.

Ce lieu pour Sidonie était tout rempli de souvenirs, et il lui semblait qu’ils étaient restés là, habitants secrets des joncs et des herbes, et que, la reconnaissant dès qu’elle parut, tels que des lutins, ils se levaient tous, chacun de son poste, et accouraient fondre sur son cœur. C’était là qu’Ernest…, ici Léontine… Elle voulait cependant écouter M. Lucas et s’efforçait d’écarter les voix argentines.

(À suivre)

ANDRÉ LÉO