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elle, et enfin il ne sortit plus personne, et le porche devint désert.

— Ne venez-vous pas ? lui dit enfin sa dernière interlocutrice. Que faisons-nous là ?

En voyant Sidonie jeter un coup d’œil dans l’église déserte, elle ajouta :

— Vous attendez les Moreau ? il y a longtemps qu’ils sont sortis par la petite porte ?

Elle ne la verrait donc plus ; elle ne l’embrasserait plus, elle ne pourrait plus lui parler… seulement de temps en temps… Était-ce possible ? N’était-ce pas trop odieux et trop cruel ? Ah ! c’était fini ! On lui arrachait l’âme avec ce dernier espoir, le plus douloureux à perdre, celui auquel se cramponne le sentiment, comme le mourant à la vie. Le lendemain, atteinte d’un mal de gorge et de fièvre, Sidonie ne put se lever. Elle fut malade quelques jours.

Pendant sa convalescence, elle reçut la visite de M. Maigret. Jamais elle ne l’avait vu si amical. Il insista pour qu’elle vînt les voir, et de telle manière, qu’elle dut promettre d’y aller à quelques jours de là, quand elle serait complètement rétablie. Cette promesse une fois arrachée, Sidonie fut bien aise de l’avoir faite. Elle souffrait tant de son chagrin, dans sa solitude, qu’elle avait besoin de mouvement, comme un noyé d’air.

M. Maigret vint la chercher au jour dit, lui-même, en voiture, et Mme Maigret la reçut d’un air agréable, qu’elle n’avait pas toujours. Sidonie n’avait pas cru que ces gens l’aimassent à ce point ; elle en fut touchée.

ANDRÉ LÉO

(À suivre)