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— Jamais, répondit-elle, jamais !

L’enfant l’entoura de ses petits bras.

— Tu es meilleure que le bon Dieu !

Le catéchisme et l’histoire sainte furent décidément abandonnés.

Mais autour d’elle pourtant et incessamment, à propos de toutes choses, elles cueillaient la science dans la vie, tantôt à pleines mains, tantôt capricieusement, suivant les forces et le désir de l’enfant. De temps en temps, Sidonie adressait à M. Favrart de longues lettres, pleines de questions, auxquelles le savant répondait par des paquets de sa grosse écriture, accompagnés de livres, de cartons, de planches ou d’herbiers. Rachel, à six ans, sut le nom et les propriétés de toutes les plantes du jardin ; elle distinguait les principales substances minéralogiques : elle connaissait aussi l’anatomie des oiseaux et des mammifères, un peu de cosmographie et de géographie pittoresque ; l’histoire de ces bons amis de l’humanité qui lui ont fourni les moyens de se mieux nourrir, vêtir, loger et de ceux qui ont enseigné aux hommes à se mieux aimer et conduire. Elle-même ensuite racontait ces histoires aux petites filles de l’école, un peu succinctement peut-être, mais avec feu.

Pendant ce temps, elle avait grandi et s’était beaucoup fortifiée. Mais c’était dans sa physionomie surtout qu’un changement remarquable avait eu lieu. Ses traits, auparavant crispés, grimaçants, s’étaient épanouis, embellis. Ses yeux brillaient de confiance et de gaieté ; sa bouche avait des sourires délicieux de finesse et d’abandon, et sa taille toute l’élégance de cette force enfantine, qui fait penser aux grandes pousses humides de séve que l’œil voit croî-