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du chagrin de l’enfant, mais elle savait bien qu’il s’apaiserait et elle rêvait de la rendre heureuse.

La première fois que la petite fille vint d’elle-même lui prendre la main, pour l’accompagner au jardin, Sidonie eut un saisissement de joie.

Bien vite, d’ailleurs, il y eut un revirement complet, et l’enfant se donna à elle avec autant de confiance, qu’elle avait d’abord montré d’éloignement.

Ce fut pour l’institutrice une suite de joies ineffables. Quand elle pressait Rachel sur ses genoux, ou la portait, le soir, dans sa couchette, et qu’elle sentait le petit bras de l’enfant se nouer autour de son cou, il lui semblait que des sources de tendresse, jusque là cachées, jaillissaient dans son cœur. Elle avait peine alors à ne pas étouffer l’enfant de caresses ; mais elle avait observé que trop de démonstrations effarouchaient la petite sauvage ; elle se retenait donc, attendait, et recevait une à une les grâces qu’il plaisait à Rachel de lui accorder, comme un amant qui tremble d’être privé des faveurs qui lui sont faites, s’il les accueille par trop de transports. Au bout de huit jours, elles étaient en intimité parfaite, et Sidonie se sentait assez en possession de la confiance de l’enfant pour pouvoir entreprendre de réformer son caractère et ses habitudes. Cette réforme était nécessaire. Il eût fallu prendre là-dessus l’avis de Mme Jacquillat. Bon Dieu ! quelle enfant ! Elle avait tous les défauts ; Mme Jacquillat eût dit les vices volontiers : sale, paresseuse, criarde, gourmande, volontaire, menteuse, etc.,