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— Eh ! mon Dieu ! ce n’est point un monstre, répondit M. Darbault, mais un homme avare, exigeant, despote, et qui suit son caractère sans trop savoir quel effet cela fait aux autres. Nous agissons tous un peu comme ça.

— Il me semble, observa Lucien, que le fils aurait pu quitter son père, ne pouvant vivre avec lui.

— Mais il ne possède rien. Le vieux Pontvigail était loin de rendre sa femme heureuse ; ça ne l’a pas empêché pourtant de se faire faire par elle un testament qui lui donne tout l’usufruit de ses biens. Le fils, il est vrai, pouvait attaquer ce testament et revendiquer une part ; il ne l’a pas fait, et peut-être a-t-il eu raison. Un procès entre le fils et le père, c’est toujours vilain ; puis le vieux eût été capable de déshériter son fils.

— Mais, reprit Lucien, M. Louis ne peut-il gagner sa vie de quelque manière ?

— Non, M. Delfons, il n’a pas fait d’études suivies, et puis, avec les idées qu’il a, c’est difficile. Une fois il a failli s’engager ; mais c’est un homme qui regarde la guerre comme l’assassinat organisé.

— Eh bien, dit M. Darbault, puisque vous vous intéressez à l’ours des Saulées, je crois pouvoir vous annoncer que des jours plus heureux se préparent pour lui. On complote une union qui lui donnera pour femme la plus belle fille de Loubans.

— Qui donc ? »

Marius rougit.