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payer ma dette à l’humanité ma mère. Et tu m’aimeras bien, n’est-ce pas ? »

Il la regardait tendrement, les yeux pleins de larmes. Tout émue, Cécile dit en l’embrassant :

« En ce moment, tu ressembles à notre père. Tu es un noble et bon cœur ; mais il y a de la souffrance dans ton accent. Tu me caches quelque chose ?

— C’est vrai, ma chérie. Il y a encore… il y a que mon cœur est un pauvre fou : il se prend partout. Lilia est bonne, charmante… et romanesque. J’ai failli trahir ce brave docteur. Ne me gronde pas ; je n’ai pas trop mal agi, et tu vois que je t’embrasse ; mais vraiment l’air de ce pays n’est pas bon pour moi.

— Partons ! dit-elle en étouffant un soupir. Maintenant, je le veux, partons ! »

Aussitôt après le dîner Cécile retomba dans l’attente. Vers huit heures enfin elle n’y tint, et, se tournant vers son frère :

« Il est arrivé quelque chose à Louis, dit-elle avec l’anxiété dans les yeux. Voici la première fois depuis la mort de son père qu’il manque de venir ici. Je veux aller aux Saulées, viens avec moi.

— Il ne lui est rien arrivé, répondit Lucien tristement. Je savais qu’il ne viendrait pas. »

Et, prenant sa sœur dans ses bras, il la fit asseoir sur ses genoux et lui rapporta ce qu’il tenait de l’oncle Darbault. La tête de la jeune fille se pencha sur l’épaule de son frère et elle resta sans couleur et sans voix.